Texte original : Dan Cudahy « Veganism as a Minimum Standard of Decency »
Traduction : « La pilule rouge »
« Dans des discussions avec des non-vegans –particulièrement les non-vegans sur Internet qui sont familiers avec les deux affirmations du mouvement vegan des droits des animaux et les affirmations du contremouvement—le problème de la « délimitation » est souvent amené comme une sorte d’objection au veganisme. Alors qu’il est vrai que les vegans évitent beaucoup de souffrance, l’argument fonctionne comme cela, les vegans causent également indirectement beaucoup de souffrance : des animaux sont tués par les récolteurs de cultures et véhicules motorisés ; des pesticides naturels et artificiels sont utilisés pour les cultures ; et fréquemment on ne peut dire exactement quel mal a été causé soit directement aux animaux soit à l’environnement dans tous les cas, même en achetant au magasin d’aliments naturels locaux ou au marché du village. Puisque les vegans n’ont pas atteint la perfection de la pureté dans l’art de ne pas causer de mal et dans la non-violence, on a vraiment un cas de délimitation, et tant qu’une personne n’a pas atteint la perfection absolue de la pureté, elle n’a pas le droit de critiquer toute autre limite qui pourrait être tracée. Critiquer les autres limites c’est ne pas reconnaître soi-même ses propres défauts par rapport à la perfection platonique, et donc d’être –osons le dire- hypocrite.
Mettre des limites peut être difficile dans toute question de morale, et plus la limite est précise, plus les difficultés surviennent. Cependant, la difficulté de mettre des limites précises ne devrait pas nous dissuader d’explorer les limites moins précises de standards minimums ou de bases morales qui sont (ou devraient être) raisonnables pour la grande majorité des gens dans la société, même si cela demanderait une abolition complète de l’agriculture animale.
Nous établissons et défendons philosophiquement des bases morales régulièrement dans la société sous forme de lois en rapport avec des problèmes tels que le meurtre, l’homicide involontaire, l’agression, les déclarations de guerre, et les limitations de vitesse, même s’il peut être tout aussi difficile de mettre des limites pour ce genre de problèmes qu’avec les problèmes avec les animaux. Aucun de nous n’est non plus « pur » lorsqu’il s’agit de protéger les humains de la cruauté ou la mort ; et pourtant nous plaçons des limites : nous ne sommes pas cannibales ; et la plupart d’entre nous ne soutiennent pas en toute connaissance de cause ou joyeusement l’esclavagisme humain et leur massacre.[1]
Nous avons le devoir d’établir et de défendre philosophiquement de telles bases pour les animaux. A la place, nous avons une politique de laissez-faire niveau morale (et injuste) où l’on refuse de même discuter des limites à placer par rapport aux animaux, peu importe les similitudes accablantes qu’ils ont avec nous en terme de caractéristiques moralement pertinentes : la sentience et l’intelligence perceptuelle et la conscience.
Vu les similitudes moralement pertinentes et les différences non pertinentes entre les humains et autres animaux, et vu qu’il est probable que nous trouvions que la perfection absolue dans le fait de ne pas causer de mal soit bien trop ascète ou impossible à atteindre de manière pratique dans notre société moderne, le veganisme est la base morale que nous nous devons de promouvoir et que nous devons appliquer. Le veganisme n’est pas la finalité ou le mieux que nous puissions faire ; plutôt, c’est le minimum que nous puissions faire.
Le veganisme, c’est s’abstenir fondamentalement de participer à l’exploitation et l’abattage délibéré ou le massacre des êtres non-humains. Prévenir les décès fortuits et accidentels d’humains dans les accidents de la circulation et l’action de la police – même les morts humaines prévisibles – n’est pas requis par les lois interdisant l’esclavage et le meurtre. De la même manière, prévenir les morts accidentelles et fortuites dans les accidents de la circulation ou dans les récoltes de culture – même les morts prévisibles – n’est pas requis par le veganisme. En d’autres mots, l’approche abolitionniste des droits des animaux, telle qu’elle est perçue aujourd’hui, et la base morale correspondante du veganisme sont précisément la même chose en terme de « délimitation » que les lois interdisant l’esclavagisme pur et simple et le meurtre. Les lois interdisant l’esclavagisme et le meurtre ne disent rien par rapport à la prévention des blessures liées aux véhicules motorisés et les accidents mortels, ou combien d’argent nous devrions engager pour sauver la vie d’un enfant blessé, ou les balles perdues dans une guerre justifiée d’auto-défense. Nous devrions clairement prendre les mesures appropriées pour réduire autant que possible de telles morts, mais encore une fois, le veganisme est simplement une première norme minimum, pas la meilleure ni la finale.
Choisir de consommer des produits animaux est un choix de participer à l’exploitation et au massacre intentionnel d’êtres sentients. Vu notre large variété de choix de nourriture aujourd’hui, nous pouvons facilement refuser de participer à une telle exploitation et massacre. Dans bien des cas, tel que celui-ci, mettre des limites peut être très approprié et solidement défendu, surtout quand on reconnaît que cette limite placée est seulement la norme minimum de la décence, pas la norme maximum de la pureté.
Notes :
[1] Si vous vivez et payez vos taxes dans un pays industrialisé, avec une forte puissance militaire, tel que les Etats-Unis, vous cautionnez par inadvertance, indirectement et malheureusement involontairement, je l’espère, le massacre d’être humains innocents sous la forme de guerre dans d’autres pays (déclenchées principalement pour des raisons économiques ; raisons économiques qu’on pense être aussi des raisons ‘de sécurité nationale’) et la fourniture d’armes à des milices violentes, tout comme les vegans cautionnent par inadvertance, indirectement et involontairement le massacre de non-humains innocents juste en vivant et en payant leurs taxes dans notre société basée sur l’exploitation animale.
[2] J’ai édité cet essai en date du 9 juillet 2009 pour retirer 2 références au jaïnisme suggérant une norme ascétique de non-violence. Je pensais auparavant que beaucoup ou la plupart des adeptes du jaïnisme prenaient des mesures ascétiques afin d’éviter de faire du mal. J’ai depuis appris que ce n’est pas le cas, et que, bien que le veganisme augmente parmi les adeptes de cette religion, beaucoup ne sont pas vegans et encore moins pratiquants d’une forme ascétique de non-violence. »