Les imposteurs, les pitres, les clowns, les opportunistes et les menteurs ont toujours dominé le monde politico-médiatique.
C’est grave, mais ça l’est plus encore quand des questions éthiques fondamentales sont en jeu.
Nous le constatons aujourd’hui avec la question des « droits des animaux » (expression qui ne signifie plus rien à force d’être galvaudée), devenue depuis quelque temps à la mode en France, qui tente maladroitement de combler son retard calamiteux en ce domaine.
En effet, il ne se passe pratiquement plus un jour sans qu’on tombe sur un article ou une émission qui ne traite du sujet.
Faut-il s’en réjouir pour les animaux ? Rien n’est moins sûr.
En effet, que valent les discours vides des opportunistes qui, parce que la question est, justement, à la mode, prennent le train en marche et pondent livre sur livre sans que rien de bon, rien de vrai, rien de cohérent n’en sorte jamais ?…
Dernière publication en date : le Manifeste pour les animaux dirigé par Franz-Olivier Giesbert, paru aux éditions Autrement. Une perle d’abjection.
Un beau titre engagé aussi peu en accord avec le contenu réel du livre que ne l’est celui de l’autre ouvrage de M. Giesbert consacré au même sujet, paru chez Fayard de manière simultanée : L’Animal est une personne.
Monsieur Giesbert, lorsqu’on écrit que l’animal est une personne, la moindre des choses est de traiter l’animal en personne, ce qui suppose d’abord de ne pas le consommer, comme vous le faites, à certaines sauces.
Que retirera le grand public de vos sombres incohérences, sinon un flou grandiose et dommageable à la cause que de fait vous ne défendez pas ?…
La liste des intervenants du Manifeste laisse rêveur, à commencer par son auteur : M. Giesbert se prétend végétarien militant quand il n’est donc ni l’un, ni l’autre, goûtant par exemple la chair des poulets pour vérifier s’ils sont « fermiers ».
La suite est à l’avenant :
Michel Onfray, grand amateur de produits d’origine animale devant l’éternel, et grand essentialiste pour qui la suprématie humaine ne fait aucun doute. Ses prises de position contre la chasse et la corrida sont classiques et consensuelles.
Boris Cyrulnik, homme de convictions tièdes, qui ose parler de droits des animaux alors qu’il continue de les consommer sous toutes les formes.
Elisabeth de Fontenay qui, au moyen d’acrobaties philosophiques pitoyables, s’efforce vainement de justifier son manque de courage pour devenir végane. Depuis des années on la voit aligner pieusement les absurdités dans de gros livres savants, comme cette perle parfaitement ridicule éructée lors d’une interview : « Si j’étais végétarienne, je me retrancherais de la communauté des êtres humains ». (Source)
Jean-Didier Vincent, biologiste, dont je ne sache pas qu’il soit allé loin dans la cohérence.
Isabelle Sorente, écrivaine, dont le discours timide et nuancé ne remporte pas l’adhésion, par exemple ici : http://www.vegeshopper.com/2013/10/la-romanciere-isabelle-sorente.html
Frédéric Edelstein, dompteur chez Pinder et fier de l’être.
Hugo Desnoyer, boucher et fier de l’être.
Anne-Marie Philipe, dont je ne saurais que dire étant donné que je ne la connais pas. Ce qui est certain, c’est que le monde militant ne la connaît pas non plus, ce qui augure mal de la suite.
Le fait que M. Giesbert n’hésite pas à convier, dans son livre, la parole des bourreaux Edelstein et Desnoyer (qui toucheront, en plus, leur pourcentage), est en soi hautement révélateur.
Car l’on ne donne pas la parole aux bourreaux si l’on prétend respecter leurs victimes.
Voit-on des rescapés d’un massacre humain inviter des bourreaux à disserter dans un livre afin d’y exprimer leur « point de vue » ?
Bien sûr que non.
Et moins encore deviser avec eux « joyeusement », comme il est dit dans la présentation de l’ouvrage sur le site de l’éditeur : http://www.autrement.com/ouvrage/manifeste-pour-les-animaux-franz-olivier-giesbert
La mode est dangereuse en ce qu’elle met sur le devant de la scène des imposteurs au discours parfaitement creux et contre-productif – le propre des imposteurs étant de n’avoir pas de convictions réelles, ce qui se vérifie en les lisant : leurs discours ne résistent pas à l’analyse, fût-elle même superficielle. Ils ne trompent personne, sauf les candides, qui sont légion.
Personne ne doit s’étonner de la présence du boucher Desnoyer et du dompteur Edelstein dans ce livre pathétique : au contraire, cette présence est parfaitement logique.
Voilà ce que le plus connu des moteurs de recherche fait apparaître lorsqu’on tape « Hugo Desnoyer » :
« Hugo Desnoyer
hugodesnoyer.fr/
d’Hugo Desnoyer. Respect des bêtes, respect des éleveurs, respect de l’environnement, respect de l’antique métier de boucher. «
Tout un programme décidément.
Conclusion : absolument rien de bon ne peut sortir de l’incohérence d’un discours ni de l’opportunisme de son auteur.
Matthieu Ricard, qui vient de sortir lui aussi un Plaidoyer pour les animaux aux éditions Allary, a par exemple parlé jeudi 23 octobre sur France 5, dans l’émission « La Grande Librairie », de « l’extrémisme » (sic) dont faisaient preuve les militants cohérents : http://culturebox.francetvinfo.fr/emissions/france-5/la-grande-librairie/laurent-mauvignier-matthieu-ricard-alice-ferney-et-eric-vuillard-191989
Il a clairement exprimé son indignation quant au fait que l’on puisse comparer le sort des animaux avec des tragédies humaines comme la Shoah, ajoutant que comparer c’était insulter les victimes.
Ces gens n’aident pas les animaux ; ils les enfoncent. Par leur lâcheté intellectuelle ou intestinale (Messer Gaster ignore la compassion), leur besoin de gloire, leur absence d’implication réelle, leur spécisme constitutif et leur ignorance.
Le monde militant ne doit pas relayer les ouvrages de ces individus, mais au contraire en dénoncer l’imposture.
Le monde militant doit comprendre que la fin de l’esclavage animal passe nécessairement par le véganisme, seul mode de vie cohérent avec le respect des animaux puisqu’il les garantit de l’exploitation.
Ce n’est que par la radicalité et la cohérence de nos paroles et de nos actes que les droits des animaux seront respectés.
Le reste n’est que vanité, dans les deux sens de ce terme.